[ Périgueux - Grand Place - Un peu plus haut... Encore un peu... Oui là ! ]
Ce qui était pratique quand on connaissait Périgueux comme sa poche, c'était d'avoir remarqué les habitudes des passants, mêmes des habitants. Personne ne songeait à lever les yeux quand on était devant l'église, sur la Grand Place. Si le regard ne balayait pas le niveau du sol, c'était pour admirer l'église justement, dans son architecture si spéciale pour la région. Le brune en avait tiré les conclusions qui s'imposaient, et avait pris l'habitude de monter à l'étage d'une maison désaffectée, au bord de la place et de se poster à la fenêtre. Elle ne doutait pas être la seule à le faire dans ce bâtiment, étant donné que l'ancien propriétaire avait mis les clefs sous la porte comme on disait. Yodéa avait fermé leur taverne un beau jour, alors qu'elle était en voyage, sans la prévenir... Elle lui en voulait énormément depuis et avait toujours gardé un double de ses entrées.
La fenêtre ouverte, assise sur le rebord en profitant du fait qu'il ne pleuve pas, Gadzelle regardait et écoutait. Parfois elle ne reconnaissait pas tout le monde. Parfois certains mots ne portaient pas jusqu'à elle. Mais dans l'ensemble, la brune suivait.
Le châtain par exemple, impossible d'oublier ce regard perçant. Namaycush et sa célèbre maxime... Memento Mori. Derrière lui, des inconnus, identifiés comme des partisans, vassaux, soldats... Un nom peut être déformé retint néanmoins son attention. De Lendelin... Gascogne, ça fleurait le sud. Et Kahhlan. Kahhlan, l'amie, la dignité faite femme. Étrange de la voir habillée comme ça, on l'apercevait rarement sans houppelande et tenue plus féminine en temps... de paix.
La guerre sonnait, claironnait et appelait son lot de mort, clamait sa soif de sang. Les motifs en étaient nobles, certes. Comment ne pas soutenir une croisade ?
De l'autre côté du calice, objet symbolique, l'encouronné se drapant d'un succès dont seul il imaginait le prestige et les aboutissants. Autour de lui, sa cour. Tellement révélateur qu'il leur ait demandé uniquement à eux de venir... En même temps, qui s'en souciait dans ce Périgord moribond ? Replié sur lui même, empêtré dans de fausses guerres personnelles, personne ne se souciait de l'image que les autres provinces avaient de leur comté natal ou d'adoption.
Von... Qui se soucie de tes plans, complots, machinations ? Qui connaît toutes les ramifications des schémas que tu élabores ? Qui te suit dans cette soif immense de pouvoir qui te dévore ? Qui te soutient et t'apprécie réellement dans cette fable de gloriole que tu t'inventes surement pour te satisfaire ? ... Qui est à même de te comprendre, tout simplement...
Alors qu'il voulait paraître aimé et entouré, il lui semblait bien seul. Lui qui aimait s'entourer de gens utiles à ses bottes était trop prétentieux pour reconnaître en une personne son égale et l'apprécier comme telle. Il trouverait tôt ou tard un terrain où se comparer, se battre. Toujours la confrontation, parfois la séduction. Vaincre uniquement. S'imposer s'il le faut. Restait-il seulement une personne près de lui qui osait le prévenir de l'impasse vers laquelle son arrogance le menait ?
Elle l'avait pourtant aimé, avant que son ego démesuré et leurs différences ne mettent trop de distance entre eux. Il fut un temps où elle lui aurait dit ce qu'elle pensait de lui. La haine qui l'habitait à cette heure ne laissait aucune place à la discussion.
La brune chassa ses pensées d'un clignement des yeux.
Sous les bannières si hétéroclites réunies en cet instant improbable, le Carmin prêta serment.
Gadzelle serait de ceux qui pourraient dire : J'y étais, je suis témoin. Charisme et confiance en soi. Namaycush avait juré sur le Périgord, l'Ordre Teutonique et la Croisade.
Soudain lasse, elle se demanda si cela avait même une quelconque importance. Une journée banale de plus au pays des complots, machinations et guerres incessantes. Le Pouvoir avait-il si bon goût que certains parient leur Honneur à vouloir le posséder ?
Sujet: RP - Namay Péri